Donnez je vous prie de vos nouvelles à une vieille amie qui en verité n’a pas moins d’attachement pour vous que tous ces jeunes qui vous en disent merveilles. P. O.
Monsieur le Baron,
Je m’empresse de faire parvenir à Votre Excellence les renseignements que vous avez désiré avoir touchant les règlements qui traitent de la propriété littéraire en Russie.
La littérature n’est devenue chez nous une branche considérable d’industrie que depuis une vingtaine d’années environ. Jusque là elle n’était regardée que comme une occupation élégante et Aristocratique. M-de de Staël disait en 1811: en Russie quelques gentilshommes se sont occupés de littérature. (10 ans d’Ex.[il]). Personne ne songeant à retirer d’autre fruit de ses ouvrages que des triomphes de société, les auteurs encourageaient eux-mêmes la contrefaçon et en tiraient vanité, tandis que nos académies donnaient l’exemple du délit en toute conscience et sécurité. La première plainte en contrefaçon a été portée en 1824. Il se trouva que le cas n’avait pas été prévu par le législateur. La propriété littéraire a été reconnue en Russie par le souverain actuel. Voici les propres termes de la loi:
Tout auteur ou traducteur d’un livre a le droit de l’éditer et de le vendre comme propriété acquise (non héréditaire).
Ses héritiers légitimes ont le droit d’éditer et de vendre ses ouvrages, (dans le cas que la propriété n’en soit pas alliénée) pendant l’espace de 25 ans.
25 ans passés, à dater du jour de sa mort, ses œuvres et traductions deviennent la propriété du public. Loi du 22 avril 1828.
L’ammendement du 28 avril de la même année explique et complette ces règlements. En voici les principaux articles.
Une œuvre littéraire soit imprimée soit manuscripte ne saurait être vendue ni du vivant de l’auteur ni après sa mort pour satisfaire ses créanciers, à moins qu’il ne l’aie exigé lui-même.
L’auteur a le droit, nonobstant tout engagement antérieur, de faire une nouvelle édition de son ouvrage si les deux tiers en sont changés ou bien entièrement refondus.
Sera regardé comme contre-facteur l) celui qui en réimprimant un livre n’aurait pas observé les [règlement] formalités voulues par la loi, 2) celui qui vendrait un manuscript ou le droit de l’imprimer à deux ou plusieurs personnes à la fois, sans en avoir eu le consentement, 3) celui qui publierait la traduction d’un ouvrage imprimé en Russie (ou bien avec l’approbation de la censure Russe) en y joignant le texte même, 4) qui réimprimerait dans l’étranger un ouvrage publié en Russie, ou bien avec l’approbation de la censure Russe, et en vendrait les exemplaires en Russie.
Ces règlements sont loin de résoudre toutes les questions qui pourront se présenter à l’avenir. La loi ne stipule rien sur les œuvres posthumes. Les héritiers légitimes devraient en avoir la propriété entière avec tous les privilèges de l’auteur lui-même. |